Paul le Perse

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Paul le Perse est une expression pouvant désigner plusieurs personnages originaires du royaume des Perses ayant vécu au VIe siècle, et qu'on distingue mal :

  • Sous ce nom est désigné un philosophe aristotélicien dont on conserve des textes en syriaque : un Traité sur la logique d'Aristote composé par Paul le Perse à l'intention du roi Khosro (c'est-à-dire Khosro Ier) qui se trouve dans un manuscrit de la British Library (ms. 988 [Add. 14660], fol. 55v-67r)[1] ; un court commentaire du De l'interprétation qui se trouve dans un manuscrit du monastère Notre-Dame-des-Semences d'Alqosh (ms. Vosté 53 = Scher 50, cah. 24, p. 1-15), et également dans un autre ayant appartenu à Paul Bedjan[2]. Il est indiqué pour ce texte qu'il a été traduit du pehlevi en syriaque par Sévère Sebôkht. En outre, le philosophe musulman iranien Miskawayh (mort en 1030) cite dans son Tartib al-sa'ādāt un autre texte de Paul adressé au roi Khosro Ier qui était une introduction générale à la philosophie d'Aristote. Ce maître de philosophie de Khosro Ier est signalé par la Chronique de Séert[3] et par Bar-Hebraeus[4]. Ces deux sources le présentent comme un dignitaire chrétien apostat, passé au mazdéisme ; Bar-Hebraeus le situe au temps du catholicos nestorien Ézékiel (regn. 570-581).
  • Il existe un personnage du même nom dans un texte byzantin, en langue grecque, conservé dans trois manuscrits[5] : le Débat de Photeinos le Manichéen et de Paul le Perse. Il se présente comme la transcription d'une dispute en trois journées ayant eu lieu à Constantinople sur l'ordre des co-empereurs Justin Ier et Justinien (soit entre le 1er avril et le ) et sous la présidence de l'éparque Théodore « Têganistès », traitant successivement de l'origine des âmes humaines, de la doctrine manichéenne des deux principes et de la validité de l'Ancien Testament.
  • Il est encore question d'un personnage du même nom dans les Instituta regularia divinæ legis[6] du haut fonctionnaire byzantin Junillus Africanus, qui fut questeur du Palais Sacré, successeur dans cette charge de Tribonien, de 542 à 549. Cet ouvrage est un traité pédagogique en latin sur l'exégèse biblique. Il est adressé à l'évêque africain Primase d'Hadrumète, compatriote de Junillus, qui fit un séjour à Constantinople en 541/42, au cours duquel il demanda au questeur s'il connaissait un éminent exégète des Livres Saints. Junillus désigna Paul le Perse, théologien formé à l'école de Nisibe[7], auteur d'un ouvrage sur l'exégèse intitulé Regulæ, et Primase lui demanda de le traduire du grec en latin, ce qui donna les Instituta regularia. Junillus ajoute qu'il a également assisté à un remarquable cours de Paul sur l'Épître aux Romains[8]. Ce personnage peut être le même que l'interlocuteur de Photeinos le Manichéen.
  • Il existe aussi un Paul de Bassora, métropolite de Nisibe, signataire d'un concile de l'Église de Perse en 554[9]. Selon la Chronique d'Arbèles (texte incertain)[10], formé à l'école de Nisibe, il enseigna à Arbèles pendant trente ans avant d'être nommé métropolite de Nisibe par le catholicos Aba Ier après son retour d'exil, soit en 551. Selon la Chronique de Séert, il joua un rôle crucial dans la déposition du catholicos Joseph (567) et l'avènement d'Ézékiel (570)[11], et s'étant brouillé avec ce dernier mourut alors qu'il allait être destitué pendant le siège de Dara par Khosro Ier en 573[12]. On sait notamment par plusieurs textes que cet évêque Paul de Nisibe dirigea une délégation d'évêques nestoriens à Constantinople, à l'invitation de Justinien après la paix qu'il conclut avec Khosro en décembre 561 : par l'Histoire ecclésiastique de Barhadbshabba 'Arbaya[13] ; par la Chronique de Séert[14]. Dans son Catalogue des écrivains ecclésiastiques, Ébedjésus de Nisibe attribue à Paul de Nisibe un Traité de controverse contre César[15] ; l'écrivain copte Abu al-Barakat ibn Kabar († 1324), dans son ouvrage La Lampe des ténèbres, précise que ce traité avait la forme d'une lettre adressée à Qiswai, médecin du roi Khosro[16]. On conserve un fragment de ce compte-rendu dans un manuscrit syriaque de la British Library datant du IXe siècle (ms. Add. 14535, fol. 16v-20r), où il est inséré dans un florilège anti-nestorien (d'origine monothélite)[17].

L'opinion dominante est que cela fait au moins trois personnages distincts : le métropolite nestorien de Nisibe († 573) ; le philosophe aristotélicien au service de Khosro Ier (flor. autour de 570 selon Bar-Hebraeus) ; et un théologien formé à l'école de Nisibe et résidant à Constantinople entre les années 520 et 540 (qui peut correspondre à l'interlocuteur de Photeinos le Manichéen en 527 et à l'inspirateur du traité de Junillus Africanus).

Notes et références

  1. Le texte commence par la formule « Au fortuné Khosro le meilleur des hommes, Paul, ton serviteur, salut ! ». Le manuscrit a été décrit par Ernest Renan en 1852, et le texte édité par Jan Pieter Nicolaas Land, Anecdota Syriaca, vol. IV, Leyde, E. J. Brill, 1875, p. 1-32 (avec une traduction latine). La ville de naissance de Paul est mentionnée dans le manuscrit, mais malheureusement le nom est déformé ; il s'agit peut-être de Rew-Ardashir (actuellement Bouchehr), métropole du Fars. Paul était alors « Perse » stricto sensu, c'est-à-dire originaire du Fars.
  2. Texte édité avec une traduction française et un commentaire par Henri Hugonnard-Roche, Studia Graeco-Arabica 3, 2013, p. 37-104.
  3. IIe partie, § 24 (« Histoire de Khosrau Anoširvan »), PO VII, Paris, 1911, p. 147 : « Il [sc. Khosro] était très versé dans la philosophie, qu'il avait apprise, dit-on, chez Mar Bar Sauma, évêque de Qardou, durant son séjour dans cette région, et chez Paul le philosophe perse, qui, n'ayant pu obtenir le siège de métropolite du Fars, renonça à la religion chrétienne ».
  4. Chronicon ecclesiasticum, IIe partie, éd. Abbeloos et Lamy, Louvain, 1872, vol. III, col. 97-98 : « À cette époque [sc. vers 570] fleurissait dans les différentes branches de la science ecclésiastique comme de la philosophie des païens Paul le Perse, dont nous conservons une remarquable introduction à la logique. Il voulait devenir métropolite du Fars. Comme le peuple de là-bas n'était pas d'accord, il fit affaire avec les Mages et passa à leur religion ».
  5. Sinaiticus gr. 513 (383), fol. 130v-136v ; Vatopedinus 236, fol. 129v-135r ; Vaticanus gr. 1838, fol. 249v-258v. Texte publié par le cardinal Angelo en 1847 à partir du manuscrit du Vatican, reproduit en PG, vol. 88, col. 529A-552C.
  6. Heinrich Kihn (éd.), Iunilii [sic] Africani Instituta regularia divinæ legis, Fribourg-en-Brisgau, Herder, 1880.
  7. « Ad hæc ego respondi vidisse me quemdam Paulum nomine, Persam genere, qui Syrorum schola in Nisibi urbe est edoctus ».
  8. « Sunt alia illius viri præclara monumenta : nam et beati Pauli ad Romanos epistolam audivi subtilius, ut arbitror, exponentem, quam [sic] ego ex ejus ore, ne memoria laberetur, excepi ».
  9. Synodicon orientale, éd. Jean-Baptiste Chabot, Paris, 1902, p. 366.
  10. Alphonse Mingana (éd.), Sources syriaques I, Leipzig, 1907, p. 156.
  11. IIe partie, § 36, éd. cit., p. 192.
  12. Ibid., p. 194.
  13. Éd. François Nau, PO IX, 5, Paris, 1913, p. 628-630 : « Ensuite il [sc. Abraham de Beth Rabban, directeur de l'école de Nisibe] envoya l'évêque Paul avec d'autres qui l'accompagnèrent. Ils allèrent devant César et défendirent la foi qu'ils professaient et les Pères qu'ils prêchaient, et ils en revinrent triomphalement ».
  14. IIe partie, § 32, éd. cit., p. 187 : « On rapporte que Justinien, après la conclusion de la paix avec Khosrau, demanda à celui-ci de lui envoyer quelques savants persans. Khosrau lui envoya Paul métropolite de Nisibe, Mari, évêque de Balad, Bar Sauma, évêque de Qardou, Isaïe, interprète à Séleucie-Ctésiphon, Ichoyahb d'Arzoun qui devint catholicos d'Orient, et Babaï, évêque de Sinjar. Justinien les honora tous. La controverse, qui fut écrite, dura trois jours ». Plusieurs érudits ont situé cette conférence après la première paix conclue entre les deux souverains en 532. Mais Antoine Guillaumont (« Un colloque entre orthodoxes et théologiens nestoriens sous Justinien », Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 114, n° 2, 1970, p. 201-207) a montré qu'il était bien plus vraisemblable de la placer après la paix de 561. La conférence dure trois jours comme celle de 527 avec le manichéen.
  15. Joseph-Simonius Assemani, Bibliotheca Orientalis, vol. III, Rome, 1725, p. 88.
  16. La Lampe des ténèbres et l'illumination du service, § 7, éd. par Wilhelm Riedel, « Der Katalog der christlichen Schriften in arabischer Sprache von Abū 'l-Barakāt », Nachrichten der kgl. Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen, philologisch-hist. Klasse 5, 1902, p. 635-706, spéc. p. 652 : « une lettre écrite par Paul de Bassora, métropolite de Nisibe, dans laquelle se trouve la discussion qu'il eut avec Justinien sur les fondements de la foi, quand il fut invité par lui, et qu'il adressa à Qisway, médecin royal ». Il devait s'agir du compte-rendu officiel au roi, puisque la délégation avait été en principe envoyée par Khosro.
  17. Éditions : Mario Amelotti et Livia Migliardi Zingale (éd.), Scritti teologici ed ecclesiastici di Giustiniano (Legum Iustiniani Imperatoris Vocabularium, Subsidia III), Milan, A. Giuffrè, 1977, p. 180-187 ; Sebastian Brock (éd.), « A Monothelite Florilegium in Syriac », in After Chalcedon : Studies in Theology and Church History, Louvain, 1985, p. 35-45.

Bibliographie

  • Javier Teixidor, Aristote en syriaque: Paul le Perse, logicien du VIe siècle, Paris, CNRS Éditions, 2003.
  • Bozorgmehr Loghman, پاول پارسی: گویایی ارستو, Tehran, Shourafarin, 2016.

Liens externes

  • Paul the Persian (Encyclopedia Iranica)
  • Paul the Persian (Raham Asha)
  • The Syriac Institute
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